On s’aime à nouveau ?

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Nous sommes entrés dans une nouvelle ère industrielle bien avant le Covid-19. Ce dernier a accéléré la rupture entre les employeurs et les employés. Où que l’on soit aujourd’hui, on observe que les pièces du puzzle en matière d’organisation du travail ne se remettent pas en place.

Par Fanny Potier-Koninckx , Partner & Director People and Leadership Strategy, Transformation au BCG

Du côté des entreprises, la situation est d’une complexité énorme. Elles se débattent avec la nécessité d’agir pour le climat, de s’engager sur différents enjeux sociaux et responsables, de protéger leurs salariés, tout en faisant face à une crise d’attractivité majeure sur ce front. Les ruptures technologiques touchent tous les secteurs et changent la donne en matière de compétitivité. Et les entreprises doivent continuer de servir les intérêts de leurs actionnaires financiers, en attente de retours à court terme pour la plupart. Face à ces pressions, les transformations internes s’accélèrent, créant une forte volatilité dans les relations employeurs-employés. Avec pour objectif de réinventer les business modèles, d’enrichir la relation humaine dans l’entreprise et de monter des équipes surengagées et adaptables.

 

Les signaux sont clairs indiquant que nombreux sont ceux qui ne veulent plus du modèle d’entreprise en place, les jeunes adultes en particulier. Le facteur le plus important en matière de satisfaction au travail concerne la flexibilité à deux niveaux : le lieu et le temps. Tous les indicateurs démontrent que la prise en compte de ces nouvelles attentes est absolument critique pour attirer des candidats mais aussi pour retenir les collaborateurs en poste. Par ailleurs, selon une étude conduite début 2021 par The Network et BCG auprès de plus de 200 000 salariés dans le monde, près de 52 % des participants excluraient de travailler pour une entreprise non alignée sur leurs attentes en matière de responsabilité sociétale et environnementale (55 % pour les répondants âgés entre 21 et 30 ans).

La valeur travail est toujours là mais il faut lui donner un sens, quand dans le passé d’autres paramètres jouaient, comme la nécessité économique ou la loyauté à l’entreprise. Bien d’autres facteurs entrent en ligne de compte, mais ceux-là sont prédominants et sur le « chemin critique » du réenchantement.

 

Alors comment réapprendre à s’aimer ?

D’abord, il faut accepter de tourner la page sur le modèle d’avant. Cela passe par le dialogue, l’explicitation des peurs et des angoisses devant un futur incertain et inconnu. Notre intelligence collective est immense et saura bien nous servir pour réinventer une relation au travail flexible, orchestrée autour d’un sens et d’une raison d’être partagés.Puis, il faut passer à l’action et adopter une stratégie de petits pas en lançant des expérimentations multiples. Cela se passe au niveau des équipes, qui devront équilibrer à ce niveau préférences personnelles et capacité à travailler ensemble sereinement.  Il est important de créer les conditions d’un apprentissage collectif des succès et des échecs des uns et des autres pour pluraliser l’intelligence et trouver des solutions plus riches, mieux adaptées à la diversité des collectifs en entreprise. Il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises réponses, et le maître mot est à la variabilité – à ne pas confondre avec la versatilité – pendant quelque temps pour laisser la place à cet apprentissage collectif.

Enfin, les deux parties doivent s’écouter mutuellement pour s’aimer à nouveau. Nous avons besoin les uns des autres : sans collaborateurs, l’entreprise n’existe plus ; sans entreprises, les individus, très chamboulés et de plus en plus isolés dans la société civile, perdent un espace de socialisation durable et une échelle permettant de grandir dignement en tant qu’êtres humains.

 

Cette situation est porteuse de tellement d’opportunités ! Au travail !

 

 

 

à retenir : 

environ 20 % des sondés cherchent activement un poste

-un peu plus d’une personne sur 2 envisage un changement de poste dans l’année à venir.

-en cause : l’absence de satisfaction au travail (56 %), le sentiment de ne pas être valorisé (54 %), l’absence d’excitation concernant le futur de l’entreprise (52 %).

Etude The Future Forum et BCG – fév.2022